Jorge Semprún, L'Écriture ou la Vie
« C'était excitant d'imaginer que le fait de vieillir, dorénavant, à compter de ce jour d'avril fabuleux, n'allait pas me rapprocher de la mort, mais bien au contraire m'en éloigner. [...] Ce sentiment ne s'est pas évanoui dans les rites et les routines du retour à la vie, lors de l'été de ce retour. Je n'étais pas seulement sûr d'être vivant, j'étais convaincu d'être immortel. Hors d'atteinte, en tout cas. Tout m'était arrivé, rien ne pouvait plus me survenir. Rien d'autre que la vie, pour y mordre à pleines dents. » Qui a survécu à Buchenwald, cette usine de mort dont le principe, précisément, était que personne n'y échappe, est en effet, en toute certitude, devenu immortel. C'est ce que ressent Jorge Semprún. Mais il lui aura fallu plus de quarante ans pour l'écrire. Les camps de concentration semblaient passer les frontières du dicible. Mais rien n'est indicible, et L'Espèce humaine, de Robert Antelme, L'Univers concentrationnaire, de David Rousset, ou Si c ...