
François-Henri Désérable, Un certain M. Piekielny
Gary, ou la cour des mirages
En voyage à Vilnius, un jeune écrivain tombe sur une plaque indiquant la cour d'immeuble où Romain Gary passa son enfance. François-Henri Désérable suit le spectre du gamin et se met bientôt en quête d'un autre fantôme : ce voisin nommé Piekielny qui apparaît dans La Promesse de l'aube. A-t-il existé ? N'était-il qu'une invention de Gary, incurable affabulateur ? Comme toujours avec l'écrivain, plus on enquête, plus le brouillard s'épaissit.
On devrait se méfier de l'exercice commémoratif. Au prétexte de graver pour l'édification des foules les faits tangibles de la vie des grands hommes, on ouvre parfois à la curiosité spéculative des abîmes d'incertitude. Surtout si la vie en question est celle de Romain Gary, qui avait la réputation de s'arranger avec la vérité (comme la plupart des écrivains, direz-vous, mais beaucoup plus encore : nous sommes là devant le champion olympique de la discipline, qui paraît tenir ses biographes sous hypnose). Il semble même que l'auteur des Racines du ciel ait reçu le pouvoir de s'arracher aux événements qu'il a vécus et, tel le prestidigitateur escamotant le contenu de son chapeau, de les faire s'évanouir dans une gerbe d'hypothèses volatiles et d'insolubles conjectures.
Il existe à Vilnius, en Lituanie, une plaque qui signale, au coin d'un immeuble de stuc jaune, que l'écrivain et diplomate Romain Gary y a vécu de 1917 à 1923, séjour qu'il évoque dans La Promesse d ...